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23/06/2024 19:12

POLITIQUE : Comment ont voté les quartiers dijonnais aux européennes

Un RN fort en bordure des quartiers les plus populaires votant majoritairement LFI. Un PS replié sur le centre-ville et les faubourgs... L'analyse du scrutin par bureaux de vote à Dijon éclaire les réflexions avant le premier tour des législatives anticipées.
Au soir du premier tour des élections législatives de 2022, les soutiens d'Emmanuel Macron arrivaient en tête en Côte-d'Or mais en seconde position à Dijon, derrière la NUPES, tandis que le Rassemblement national était troisième.

C'est dire l'ampleur du choc quand, avec une participation de 54,74%, Jordan Bardella est ressorti, à Dijon, le 9 juin dernier, premier des élections européennes avec 21,19% des voix. Le camp national totalisait alors 28,92%, le bloc central 18,13% et ce qui est devenu le Nouveau Front populaire 34,71%.

Dans ce contexte, à partir des données fournies par la préfecture de la Côte-d'Or, l'analyse du scrutin par bureaux de vote à Dijon peut éclairer les réflexions anticipant le premier tour des législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet prochains.


Rappel des résultats de 2022


Au premier tour de l'élection présidentielle de 2022 (75,08% de participation), les Dijonnais ont voté pour Emmanuel Macron (REN) à 30,01%, pour Jean-Luc Mélenchon (LFI) à 27,07%, Marine Le Pen (RN) à 15,11%, Éric Zemmour (REC) à 7,49%, Yannick Jadot (EELV) à 6,40%, Valérie Pécresse (LR) à 4,83%, Anne Hidalgo (PS) à 2,16% et Fabien Roussel (PCF) 1,92%.

Si l'on reprend des repères commodes, le bloc central se résumait aux 30% de Renaissance, l'union de la gauche totalisait 37,55% et le camp national 22,60%.

Au premier tour des élections législatives (50,2% de participation), sur les secteurs des trois circonscriptions les concernant, les Dijonnais ont voté pour la NUPES à 33,2%, la majorité présidentielle à 27,7%, le Rassemblement national à 12,3%, les Républicains à 10,2%, Reconquête à 4,3% (soit un total du camp national de 16,6%) et les autres candidats totalisaient environ 10%.

Tendances depuis 2022


Depuis 2022, l'effondrement des centristes et des sociaux-libéraux est donc patent à Dijon, passant d'un niveau d'environ 30% à la présidentielle et au premier tour des législatives à 18% aux européennes.

Les suffrages pour la NUPES – accord électoral de 2022 évoluant en Nouveau Front populaire en 2024 – se sont légèrement effrités, passant de 37% à environ 34%, mais tout en continuant de devancer les deux autres blocs.

Le tout a profité au camp national qui a bondi pour améliorer significativement ses suffrages – pourtant déjà très élevés – de la dernière présidentielle.

Au niveau national, les sondages concernant les intentions de vote au premier tour des législatives anticipées laissent envisager une prolongation de ces tendances : baisse de la majorité présidentielle, hausse de l'union de la gauche, forte hausse du camp national.

À noter que le poids des Républicains est relativisé dans ce paysage. Si François-Xavier Bellamy a su faire mieux que Valérie Pécresse – avec environ 10% au premier tour des législatives de 2022 et aux européennes –, le parti héritier du gaullisme sort fracturé de la crise liée au rapprochement d’Éric Ciotti du Rassemblement national. Les cadres sont hostiles au président du parti quand la moitié des militants le soutiennent, selon des sondages.

Certains secteurs de quartiers populaires et de la Toison d'or votent pour le RN


À Dijon, aux européennes, Jordan Bardella (RN) s'est approché de la majorité absolue dans un bureau du groupe scolaire Lamartine (45,95%), dans le quartier Joffre. Il réalise des scores importants dans un bureau de l'école maternelle Alsace (38,17%), correspondant au pourtour du lac Kir, ou encore à l'école maternelle du château de Pouilly (32,95%), correspondant au secteur est de la Toison d'Or, allant jusqu'à Valmy.

Les scores autour de la moyenne communale (21,19%) sont relevés notamment au groupe scolaire de la Colombière (21,33%), à l'école maternelle Victor Hugo (21,82%) ou encore au gymnase Chambelland (20,56%), dans le quartier Junot.

La tête de liste du RN n'est pas descendu en-dessous de 10%. Ses plus mauvais résultats sont remarqués à la salle des mariages (10,13%), au centre-ville, rue de Tivoli (10,85%) et au groupe scolaire Camille Flammarion (11,39%),  correspondant à un secteur de part et d'autre de l'avenue Champollion, dans le quartier des Grésilles.

Le centre-ville et le quartier Eiffel optent pour le PS mais pas les quartiers populaires


La plupart des bureaux de vote accordent entre 10% et 23% à Raphaël Glucksmann (PS-Place publique). Le candidat soutenu par le PS obtient ses meilleurs résultats dans le bureau de la salle des mariages, au centre-ville, (25,40%), à l'école maternelle Gustave Eiffel (25,30%) et à la salle des fêtes Devosge (24,63%).

Les votes les plus en phase avec sa moyenne communale (17,80%) se retrouvent notamment au centre-ville, aux Bourroches ou encore dans le quartier Maladière.

En revanche, ses moins bons résultats significatifs se retrouvent à l'école maternelle Alsace (4,49% et 6,64%), dans le quartier de la Fontaine d'Ouche, et au groupe scolaire Camille Flammarion (7,91%), correspondant à un secteur de part et d'autre de l'avenue Champollion, dans le quartier des Grésilles.

Les quartiers résidentiels soutiennent encore Emmanuel Macron


Tête de liste de la coalition soutenant l'action du président de la République, Valérie Hayer (REN) réalise ses meilleurs résultats à l'école maternelle Gustave Eiffel (21,86%), à l'école maternelle du château de Pouilly (21,04%), dans le bas du quartier de la Toison d'or, et à l'école maternelle des Hauts de Montchapet (20,87%).

Les votes les plus en phase avec sa moyenne communale (15,85%) se retrouvent notamment à l'école maternelle Dampierre, entre la place Wilson et le centre-ville, à l'école maternelle Petites Roches, dans le quartier Université, ou encore à l'école élémentaire Alain Millot, dans le quartier de la Toison d'or.

Ses plus mauvais scores significatifs se trouvent à l'école élémentaire York (6,86%), en bordure du quartier des Grésilles, au groupe scolaire Lamartine (9,46%), au bord du quartier Stalingrad, et au gymnase des Bourroches (9,56%).

Les quartiers les plus populaires plébiscitent La France insoumise


La liste de La France insoumise conduite par Manon Aubry (LFI) récolte largement la majorité absolue dans un bureau du groupe scolaire Camille Flammarion (61,39%), correspondant à un secteur de part et d'autre de l'avenue Champollion.

L'Insoumise surperforme également à l'école élémentaire York (44,40%), autre bureau du quartier des Grésilles, et à l'école maternelle des Coteaux de Suzon (36,39%), dans la partie ouest du quartier de la Toison d'or. À noter que la Fontaine d'Ouche n'est pas en reste avec 34,73% à l'école maternelle Alsace, dans un secteur correspondant à l'ouest du quai des Carrières-Blanches.

Les suffrages autour de la moyenne communale (13,11%) se retrouvent au groupe scolaire Darcy (13%), dans un bureau de la salle des fêtes Devosge (12,99%), correspondant au sud de la rue Devosge, ou encore à l'école maternelle Chevreul (13,69%).

À noter qu'un autre bureau du groupe scolaire Camille Flammarion, correspondant au secteur Bourdronnée et au sud de l'avenue Poincaré ne réalise que 10,94%.

Les moins bons scores des Insoumis se remarquent à l'école maternelle Gustave Eiffel (4,30%), aux Chantalistes (5,42%) et à l'école maternelle des Hauts de Montchapet (5,57%).

Les Écologistes limitent les dégâts à Montchapet et plongent à la Fontaine d'Ouche


Véritable contre-performance pour la liste conduite par Marie Toussaint (EELV), les Écologistes ne dépassent pas 13% à Dijon. Leurs meilleurs résultats se constatent au gymnase Boivin (12,98%), en plein quartier Montchapet, à la salle d'attente des mariages (12,95%), au centre-ville, et à l'école maternelle Chevreul (11,88%).

Les suffrages autour de la moyenne communale (7,78%) se retrouvent notamment à l'école élémentaire Voltaire (8,02%), au Jardin de l'Arquebuse (7,55%) et à l'école élémentaire Mansart (8,17%).

Alors que plusieurs bureaux de vote de la Fontaine d'Ouche comptent moins de 10 voix pour Marie Toussaint, les moins bons scores significatifs se retrouvent au centre de loisirs Marie Noël (3,22%), dans ce même quartier, à l'école maternelle du château de Pouilly (4,21%), dans le bas du quartier de la Toison d'or, et à l'école élémentaire Montmuzard (4,22%).

Les quartiers Victor Hugo et Montchapet votent encore un peu pour les Républicains


Si François-Xavier Bellamy (LR) améliore nettement la performance de Valérie Pécresse, sa liste soutenue par Les Républicains et le Nouveau Centre ne dépasse pourtant pas 17% à Dijon.

Les suffrages les plus élevés sont à mettre au compte de l'école élémentaire Victor Hugo (16,87%), du gymnase Boivin (15,22%), dans le quartier Montchapet, et du groupe scolaire de la Colombière (13,81%).

Les suffrages autour de la moyenne communale (7,64%) se retrouvent notamment au groupe scolaire Darcy (7,59%), au groupe scolaire Camille Flammarion (7,69%), correspondant au secteur Bourdronnée et au sud de l'avenue Poincaré, et à l'école maternelle Chevreul (7,75%).

Là encore, plusieurs bureaux recensent moins de 10 bulletins. Parmi les moins bons scores significatifs, on retrouve l'école élémentaire Montmuzard (3,43%), l'école élémentaire Maladière (3,52%) et l'école élémentaire York (3,61%), dans le quartier des Grésilles.

Reconquête surperforme dans le quartier Victor Hugo et plonge aux Bourroches


Surprise des élections européennes, la liste conduite par Marion Maréchal (alors REC) a dépassé les 5%. Cheval de Troie du RN ou clash avec Éric Zemmour ? Toujours est-il que la tête de liste a quitté Reconquête avec trois autres eurodéputés, n'en laissant qu'une au parti identitaire.

Les électeurs risquent donc d'être déboussolés aux législatives – seul Franck Gaillard (REC) candidatant sur la deuxième circonscription de la Côte-d'Or – laissant un réservoir de voix au Rassemblement national et aux Républicains.

Toujours est-il que, à Dijon, Reconquête réalise ses meilleurs scores aux européennes à l'école maternelle Victor Hugo (10,49%), salle d'attente des mariages (9,57%), au centre-ville, et à l'école maternelle Ouest (8,23%), autour du parc des Carrières Bacquin.

Les suffrages autour de la moyenne communale (5,23%) se retrouvent notamment au gymnase Boivin (5,22%), dans le quartier Montchapet, au centre de loisirs Marie Noël (5,26%), dans le quartier de la Fontaine d'Ouche, et à l'école maternelle Clémenceau (5,36%).

Les moins bons résultats significatifs se retrouvent à l'école élémentaire Maladière (2,34%), à l'école maternelle des Côteaux du Suzon (2,50%) et au gymnase des Bourroches (2,69%).

Les votes RN et LFI témoignent d'une société particulièrement polarisée


Même sans prendre en compte des critères sociaux comme l'âge, le niveau de diplôme ou encore le niveau de revenu, le détail du scrutin par bureau révèle l'implantation généralisée du Rassemblement national y compris dans les quartiers les plus populaires.

Ainsi, dans l'emblématique bureau de la salle d'attente des mariages, correspondant au sud du centre-ville, le camp national obtient au bas mot 22,9%.

Dans un autre bureau emblématique, autour du boulevard Champollion, dans les Grésilles, le RN (11,39%) arrive certes deuxième mais très loin derrière LFI (61,39%), les autres partis se partageant des miettes.

Cela témoigne d'une partie de la société particulièrement polarisée et d'un vote refuge en faveur des Insoumis.

Dans ce quartier des Grésilles, les votes peuvent basculer au sein d'un même site, entre deux bureaux voisins, comme c'est le cas à Camille Flammarion, révélant au gré de la sociologie et de l'urbanisme, un manque de cohésion sociale.

Les quartiers résidentiels se partagent entre les sociaux-démocrates et les sociaux-libéraux


S'il n'a guère séduit les quartiers populaires, Raphaël Glucksmann a attiré à lui les hyper-urbains et les habitants de faubourgs construits de longue date, comme les Bourroches.

Dans leur modération, les habitants de ces faubourg et ainsi que de quartiers résidentiels plus récents, comme la Toiosn d'or, ont fourni les troupes d'électeurs restant encore mobilisés pour Emmanuel Macron. C'est l'inverse du vote de «la France périphérique» mais dans des contingents dont l'importance se réduit.

Les Écologistes et les Républicains ont le plus à perdre


Bien que faisant de la «justice sociale» un argument majeur, les Écologistes ne séduisent pas l'électorat des quartiers populaires. Ce sont plutôt les habitants très urbains – potentiellement sensibles à la question des îlots de chaleur en période de canicule – et de quartiers encore considérés comme «bourgeois», à l'habitat préservé de la densification immobilière, qui se sont mobilisés. Cela interroge nécessairement la stratégie de l'écologie politique.

Tenté par Éric Zemmour à la présidentielle et aux européennes, l'électorat traditionnel des Républicains dans les quartiers Montchapet et Victor-Hugo se tournera-t-il de nouveau vers le gaullisme au moment où Éric Ciotti sème la zizanie dans le parti ?

Le vote des Républicains apparaît comme dilué dans l'agglomération dijonnaise, avec un grand écart-type et une moyenne communale faible, ce qui témoigne d'îlots de résistance propre au conservatisme.

Une participation allant du simple au double selon les bureaux de vote


En termes de participation, les habitants de la Fontaine-d'Ouche et des Grésilles se sont sentis relativement peu concernés par les européennes avec une participation oscillant autour de 33% tandis que le centre-ville, le quartier Clémenceau et le quartier Eiffel ont connu des pics à plus de 65% de participation.

Autant dire que la réserve de voix semble disponible dans les quartiers populaires ainsi que, de façon plus diffuse, dans les quartiers résidentiels.

Au-delà des législatives anticipées, le scrutin des européennes démontre qu'un espace politique conservateur et identitaire est à occuper en vue des prochaines municipales tandis que tout apparaît à reconstruire au centre avec «l'après-Macron» et que l'«union de la gauche» confirme sa dynamique propre à la capitale des ducs de Bourgogne.

Jean-Christophe Tardivon

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