La puissance agricole de l'Ukraine était dans toutes les têtes lors de l'ouverture du congrès des coopératives agricoles, ce mercredi 13 décembre, à Dijon, durant laquelle est intervenu le ministre de l'Agriculture.
«On a porté le message de souveraineté», a résumé Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, ce mercredi 13 décembre 2023, à l'issue de l'ouverture du congrès du syndicat des coopératives agricoles, organisé ces 13 et 14 décembre au palais des congrès de Dijon.
Structuré sous forme d'association, comme l'expliquent ses dirigeants, «La Coopération Agricole a pour mission de promouvoir le modèle coopératif en valorisant son action économique» en jouant un rôle de «porte-voix politique et force de proposition auprès des pouvoirs publics français et européens, des médias et de la société civile».
Elle fédère des coopératives agricoles, agroalimentaires, agro-industrielles et forestières auxquels adhèrent quelques 300.000 agriculteurs dans toute la France. Environ 180.000 salariés sont employés dans le secteur coopératif agricole.
«Les coopératives sont au cœur de la chaîne de valeur»
«La souveraineté, c'est d'abord une mise en cohérence des politiques», a-t-il développé. «On a besoin, par la planification [écologique], de montrer : est-ce que l'on peut produire de la biomasse, réduire les produits phyto ? Quels sont les besoins en eau et en même temps la sobriété qu'il faut construire.»
«Les coopératives sont au cœur de la chaîne de valeur. Comment on fait en sorte qu'on remette les coopératives plus encore dans la chaîne de valeur en disant que c'est des acteurs importants et majeurs de la rémunération des agriculteurs et de la rémunération de la transformation dans une chaîne de valeur qui doit retrouver son équilibre», a-t-il poursuivi.
«On a besoin de construire avec l'Ukraine pour faire une puissance agricole européenne»
«On a évoqué beaucoup la question européenne et internationale. Souvent, ce sont des groupes qui portent aussi des questions d'export ou des questions de positionnement à l'international. (…) Un : le cadre européen, rien que le cadre européen notamment pour les normes. (...) Deux : le cadre européen pour peu que le cadre européen essaie de se moderniser et fasse une autoanalyse de ce qui est l'absence de réactivité parfois des grands enjeux. Si ce n'est pas dans l'Europe qu'on comprend qu'on a besoin d'agilité, de souveraineté, de défendre nos intérêts...», a-t-il insisté.
«On a évoqué aussi la question ukrainienne. L'Ukraine est la bienvenue dès lors qu'on en fait un allié et pas un concurrent. On a besoin de construire avec l'Ukraine quelque chose de l'allié pour faire une puissance agricole européenne avec eux et pas une puissance ukrainienne qui viendrait déstabiliser les agricultures européennes. J'ai été le dire en Ukraine, j'ai besoin d'eux comme une puissance qui vienne asseoir la puissance européenne du continent vis à vis des Russes, de tous les grands ensembles qui se soucient singulièrement de souveraineté», a enchaîné Marc Fesneau.
La Coopération agricole demande au cadre réglementaire de permettre plus de «réactivité» pour «accompagner les agriculteurs dans les évolutions»
Lors des échanges qui ont eu lieu devant 600 congressistes mais en tenant les médias à l'écart, Dominique Chargé président de La Coopération agricole a porté quelques revendications auprès du ministre de l'Agriculture.
«J'ai exprimé auprès du ministre, de la part des coopératives agricoles, un certain inconfort dans le sens où nous souhaitons être actifs sur les grands enjeux de notre société aujourd'hui : celui de la souveraineté alimentaire, celui des transitions écologiques, celui de la décarbonation de nos métiers et celui du renouvellement des générations», a indiqué Dominique Chargé à l'issue de ces échanges.
«Notre situation est qu'aujourd'hui, nous n'avons pas le cadre réglementaire suffisant pour que nous puissions être en mesure d'accomplir ces mouvements avec suffisamment de réactivité et, surtout, de cadre juridique qui nous permette de le faire dans de bonnes conditions», a-t-il souligné.
«J'ai interpellé [Marc Fesneau] sur les sujets qui jalonnent notre quotidien, ceux qui sont autour des questions d'accès à l'eau – que ce soit pour irriguer nos cultures ou l'eau que l'on utilise dans nos entreprises –, sur la nécessité d'avoir rapidement des solutions alternatives notamment sur le retrait de molécules chimiques dont on a besoin aujourd'hui, sur le cadre nouveau que créée l'inflation et la situation que cela crée en déstabilisation économique sur nos filières. (…) Des sujets qui entravent l'efficacité de notre action et notre capacité à pouvoir accompagner les agriculteurs dans les évolutions», a résumé Dominique Chargé.
La Franche-Comté, pionnière des coopératives agricoles
Le représentant des coopératives agricole n'a pas manqué d'évoquer les filières emblématiques en Franche-Comté et en Bourgogne.
«Cette très belle région de Bourgogne-Franche-Comté a vu naître finalement le mouvement coopératif par les initiatives qui ont été prises au XIIIème siècle pour organiser la transformation du fromage, notamment du comté, avec les coopératives qu'on appelle les fruitières», a signalé Dominique Chargé.
Concernant la Bourgogne viticole, «il y a également dans cette région une excellence autour de la viticulture, un métier pour lequel la situation est d'ailleurs compliquée pour plein de raisons, des raisons économiques – de marché –, climatiques aussi, mais dans lequel le dynamisme et les qualités de l'organisation économique de la région font que la Bourgogne s'en sort plutôt pas trop mal et joui plutôt d'une bonne image».
Avant de repartir du congrès, Marc Fesneau a participé, aux côtés du président Dominique Chargé et de la directrice générale Florence Pradier, à un temps d'échanges avec de jeunes coopérateurs venus de différentes régions françaises.
Propos recueillis par
Jean-Christophe Tardivon