Une «Charte sur la protection et le partage de l'eau» a été dévoilée par François Rebsamen, ce mercredi 22 mars, sur le site de l'usine de production d'eau potable de Poncey-lès-Athée, en bord de Saône, qui alimente notamment la métropole dijonnaise.
Dijon fut la deuxième ville en Europe, après Rome, à disposer d’un réseau d’adduction d’eau potable, mis en service en 1841 grâce à l’ingénieur Henry Darcy.
«Dès lors, le partage de l’eau entre Dijon et les territoires avoisinants ses installations a été établi au travers de conventions, dans le respect des besoins de chacun», indique la Métropole qui entend «faire perdurer sa politique de solidarité territoriale en matière de fourniture d’eau aux collectivités extérieures, enjeu primordial de préservation, de développement et d’équité».
Une nouvelle «Charte sur la protection et le partage de l'eau»
L'engagement se renouvelle avec une «Charte sur la protection et le partage de l'eau» concernant au premier chef les territoires situés entre Dijon et les sources extérieures à la métropole.
À l'occasion de la Journée mondiale de l'eau, la charte a été dévoilée sur le site de l'usine de production d'eau potable de Poncey-les-Athée, ce mercredi 22 mars 2023.
La cérémonie s'est déroulée devant des élus communaux et intercommunaux ainsi que des représentants de syndicats de l'eau. Étaient présents notamment Benoît Bordat (FP), député de la Côte-d'Or, Marie-Claire Bonnet-Vallet (LCOP), maire de Pontailler-sur-Saône, Jacques-François Coiquil (Modem), maire d'Auxonne, Martial Mathiron (PS), maire de Genlis, Patrick Morelière (sans étiquette), maire d'Arc-sur-Tille, Sébastien Sordel (LCOP), maire de Tréclun, et Bruno Bethenod (sans étiquette), président de l'Association des maires ruraux de la Côte-d'Or. Éric Collin (RE), maire de Poncey-lès-Athée a accueilli les participants.
Une production moyenne de 50.000 mètres cubes par jour
Le champs captant de Poncey-lès-Athée s'étend sur 22 hectares au-dessus de la nappe alluvionnaire de la Saône. Aucune culture agricole n'est effectuée en surface. Le GAEC Collin assure simplement la fenaison.
En 1936, a été implantée une usine de pompage, transformée en 1994 pour réaliser le traitement de l'eau en retirant le fer et le manganèse.
Entre les champs de Poncey-lès-Athée et de Flammerans, la Métropole peut prélever jusqu'à 80.000 m3 par jour avec un besoin moyen de 50.000 m3. Deux canalisations, longues de 37 km, transportent l'eau jusqu'au réservoir du parc Valmy.
Des communautés de communes et syndicats de l'eau sont desservis au passage avec un prix moyen d'environ un euro le mètre cube, selon la Métropole de Dijon.
Des «échanges cordiaux» avec la Métropole
En prenant la parole, le maire Éric Collin a salué les «échanges cordiaux» avec la Ville de Dijon ainsi que la Métropole.
Vice-président de Dijon Métropole, Antoine Hoareau (PS) préside également la société d'économie mixte à objet particulier Odivea, chargée de la gestion de l'eau de la Métropole, avec Suez comme actionnaire majoritaire. Antoine Hoareau rappelle ainsi qu'Odivea exploite le champs captant et l'usine de production d'eau potable.
Investir pour limiter les fuites des réseaux d'eau
Pour sa part, François Rebsamen (PS, FP), président de Dijon Métropole, revient sur le déficit de la pluviométrie hivernale, sur les actions menées en 2022 par Odivea ainsi que sur les outils de la Métropole pour réduire ses émissions de gaz à effet serre.
Le président de la collectivité insiste sur le maintien du prix de l'eau ainsi que sur la stabilisation de la consommation alors que la population augmente : «nous pouvons avoir un développement raisonné (…) en consommant moins d'eau».
L'entretien des réseaux d'eau pour augmenter les rendements et limiter des fuites passe par «des investissements importants». «Pour une Métropole, porter ce type d'investissements ; avec un nombre d'abonnés au mètre linéaire de réseau bien plus important en ville qu'à la campagne permet effectivement plus de mutualisation», concède François Rebsamen à l'heure où chaque collectivité recherche des financements.
Le soutien de la Métropole aux territoires du bassin de la Saône
«Il faut que l'agence [de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse] poursuive son soutien aux collectivités locales dans le renouvellement des réseaux. (…) La lutte contre les fuites est un enjeu vraiment majeur pour la limitation de notre impact dans les milieux naturels et pour garantir la pérennité de notre source en eau», ajoute le président de la Métropole.
«Je veux dire la volonté réaffirmée de notre Métropole de soutenir l'ensemble des territoires qui la composent et, plus largement, des territoires qui ont des besoins en eau sur le bassin qui concerne l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse», souligne-t-il. «C'est une question de solidarité territoriale.»
Un engagement auprès de six intercommunalités et syndicats de l'eau
«La Charte sur la protection et le partage de l'eau symbolise l'engagement de Dijon Métropole à fournir de l'eau, dans le respect de l'environnement, aux six intercommunalités et syndicats suivants : la communauté de communes Cap Val de Saône, le syndicat Sinotiv'eau, le syndicat de la vallée du Suzon, le syndicat de Clénay-Saint-Julien, la communauté de communes Gevrey-Chambertin-Nuits-Saint-Georges et la communauté de communes Ouche et Montagne», indique François Rebsamen.
Ainsi, la Métropole dessert en eau potable 41 communes en dehors de son périmètre.
«La Métropole ne fera jamais de l'enjeu de l'eau un enjeu politique», assure le président de la collectivité en référence au premier article de la charte. «Depuis 1840, les Dijonnaises et les Dijonnais sont allés chercher de l'eau en dehors de la ville – on ne va pas nous reprocher ce qui s'est fait en 1840 – mais jamais la volonté n'a été de s'accaparer une ressource au détriment des habitants de ces communes. Il en a été ainsi hier, c'est le cas aujourd'hui, ce sera le cas demain.»
«Nous souhaitons simplement le développement de l'ensemble des communes du département et nous y apportons toutes nos possibilités à travers cette charte», ajoute-t-il.
La gouvernance de l'eau en débat
Le propos se situe dans un contexte de tensions politiques avec François Sauvadet (UDI), président du conseil départemental de la Côte-d'Or et président de l'Assemblée des Départements de France, qui revendique l'instauration d'une «nouvelle gouvernance de l'eau» notamment pour accompagner le financement du renouvellement des réseaux d'eau en milieu rural (
lire notre article).
«Il y a des débats, la loi a tranché. Remettre en cause cette souveraineté, c'est remettre en cause une forme de démocratie locale, c'est retirer un pouvoir qui appartient aujourd'hui aux maires et aux intercos. Ça n'empêche pas les Départements concernés d'intervenir en complément financier de celles ou de ceux qui le demanderaient pour garantir une lutte contre les fuites par la rénovation des canalisations, par exemple», développe François Rebsamen.
«La loi NOTRé a donné ce pouvoir aux intercommunalités», commentera le président de la Métropole en marge de la cérémonie. «Je pense que c'est le niveau adéquat. Les Départements seraient un peu trop loin. (…) Je ne doute pas que le Sénat défende la compétence générale des communes qui a été au cœur de notre histoire communale.»
«Il faut qu'on consomme moins», alerte Pascal Bonnetain
Avec sa casquette de premier vice-président de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse, Pascal Bonnetain revient sur les rôles de l'établissement public et du comité de bassin.
«L'histoire de l'eau, c'est notre patrimoine commun, indispensable à la vie des concitoyens. Les projets de l'eau demandent beaucoup de temps voire beaucoup d'années. Une adduction d'eau ou une station d'épuration se réalise sur deux voire trois mandats. La politique de l'eau n'est pas à court terme», signale Pascal Bonnetain.
«La température de l'air augmente, l'eau se raréfie de plus en plus. (…) L'eau doit être partagée par tous les usages et il ne faut pas les hiérarchiser : usages agricoles, usages industriels, usages domestiques, touristiques, environnementaux. (…) Il faut qu'on trouve de nouvelles méthodes et, surtout, qu'on consomme moins», sensibilise le premier vice-président de l'agence de l'eau.
L'établissement public sensibilise à une baisse de la consommation de 10% d'ici 2030 et de 30% d'ici 2050 : «tous les projets qu'on finance, il faut montrer que l'on fait de l'économie d'eau».
Après le dévoilement symbolique de la charte, les participants ont découvert les installations de l'usine de production d'eau potable.
Jean-Christophe Tardivon
Charte sur la protection et le partage de l’eau
L’eau fait partie du patrimoine commun de la Nation, article 1 de la Loi du 3 Janvier 1992. Cette Loi instaure la volonté de l’Etat français d’établir une gestion équilibrée de la ressource en eau tant du point de vue quantitatif, que du point de vue qualitatif.
La même année à Helsinki, conscientes des enjeux qui pèsent sur l’eau et dont la rareté ou la qualité parfois dégradée menacent le bien-être des populations, les Nations Unies signaient une convention sur la protection et l’utilisation durable et pacifique des ressources en eau, et ce, bien avant que les effets du changement climatique ne soient perceptibles par tous.
Dijon, depuis Henry Darcy en 1840, a développé une conscience aiguë du caractère précieux de la ressource en eau. Dès lors, le partage de l’eau entre Dijon et les territoires avoisinants ses installations a été établi au travers de conventions, dans le respect des besoins de chacun. Cette volonté a traversé les époques et les municipalités, sans que ce principe basé sur un prix juste et équitable ne soit jamais remis en cause.
Au travers de cette Charte, Dijon métropole, aujourd’hui compétente pour la gestion de l’eau, entend consacrer ce principe de partage et de protection de cette ressource, base de son engagement depuis de nombreuses générations.
Article 1 : Partage de l’eauDijon métropole s’engage à continuer sa politique de partage de la ressource en eau avec les territoires traversés par ses installations, conformément aux principes instaurés par Henry Darcy.
Concernant la gestion des eaux pluviales et eaux traitées des rejets urbains, Dijon métropole étudiera comment les mettre à disposition des acteurs du territoire qui en font la demande, dans l’objectif de préserver les ressources souterraines pour les générations futures et dans les respects des besoins des milieux aquatiques.
Article 2 : Usage raisonnable et équitableDijon métropole met en œuvre une politique d’usage durable et raisonnable de la ressource en eau qui a permis sur ces dernières décennies de supporter le développement de son territoire et l’augmentation de sa population en diminuant les prélèvements dans le milieu naturel.
Dans cette même orientation, Dijon métropole s’engage à continuer de fiabiliser et renforcer ses installations de production d’eau potable pour faire face au développement des territoires.
Dans un contexte de changement climatique où la ressource est soumise à un stress important et croissant, Dijon métropole s’engage à ne pas demander aux collectivités partenaires, un effort sur l’usage de l’eau qu’elle ne s’appliquerait pas à elle-même.
Article 3 : Protection de la ressourceAu-delà des contraintes réglementaires, Dijon métropole a engagé les études nécessaires à l’amélioration de la connaissance de ses ressources en eau et des pressions qui s’y exercent afin de renforcer la protection de celles-ci, tant du point de vue quantitatif que qualitatif.
Dijon métropole a inscrit dans ses documents d’urbanisme le principe consistant à garder l’eau sur son territoire de manière à nourrir les nappes souterraines en imposant l’infiltration des eaux de pluie.
Article 4 : Prévention, maîtrise et réduction des pollutionsDijon métropole, au travers d’un programme d’incitation à la réduction de l’usage des produits toxiques et par un traitement tertiaire des micropolluants, permis par le progrès technique et scientifique, entend prévenir et réduire les pollutions issues de l’activité de son territoire dans l’objectif de préserver ses ressources souterraines et aquatiques.
Article 5 : Réduction de l’impact et surveillance des milieuxDijon métropole met en place un programme de mesure et surveillance en continu des milieux aquatiques, qui vient compléter celles des nappes souterraines, afin de mesurer l’impact de ses actions sur les milieux naturels.