Une réaction hors-micro de Thomas Lutz a fait bondir Jérôme Durain, ce jeudi 11 avril, puis la présidente de la Région Marie-Guite Dufay qui a annoncé vouloir déposer plainte, la deuxième de la journée visant le RN.
Actualisé : Ce jeudi soir, Thomas Lutz «présente des excuses aux gens que cela a pu choquer».
En plein débat sur la fusion des lycées Saint-German et Jean-Joseph Fourier à Auxerre, un incident de séance a marqué la session du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, ce jeudi 11 avril 2024.
Président de Notre Région par cœur, principal groupe de la majorité, Jérôme Durain a demandé à Océane Charret-Godard (PS), vice-présidente chargée des lycées présentant le rapport en question, de bien vouloir s'interrompre.
«Untermensch, c'est un terme utilisé par les nazis», proteste Jérôme Durain
Jérôme Durain a déclaré alors avoir entendu Thomas Lutz (RN) employer hors-micro «Untermensch», un mot qui renvoie à une sinistre mémoire. Les nazis employaient ce terme pour désigner les «êtres inférieurs» non-Aryens.
«Monsieur Lutz a dépassé toutes les limites !», a réagi Jérôme Durain, «vous avez dit Monsieur Lutz, ''les Untermensch, cela suffit !''». «Untermensch, cela a un sens, c'est un terme utilisé par les nazis, à propos d'une de nos collèges, qui a été entendu par plusieurs personnes dans la salle !»
«À un moment, le Rassemblement national, soit vous êtes dans la République, soit vous êtes en dehors, c'est insupportable. On l'a tous entendu», a ajouté Jérôme Durain face aux dénégations de Thomas Lutz.
Suspension de séance dans une ambiance tendue
La présidente de la collectivité a suspendu aussitôt la séance. Interruption pendant laquelle Jérôme Durain est allé exprimer son courroux auprès des élus du Rassemblement national.
Pendant ce temps, un témoin a rapporté à Marie-Guite Dufay avoir entendu que les propos de Thomas Lutz était «vous nous considérez comme des Untermensch», en réaction à une précédente interruption de son temps de parole pour avoir dépassé les 3 minutes imparties.
Jérôme Durain est ensuite allé, lui aussi, témoigné auprès de la présidente de la Région, tandis que Julien Odoul tançait visiblement Thomas Lutz, un rien piteux devant son chef de file.
«C'est une faute extraordinaire», dénonce Marie-Guite Dufay
Le calme étant à peu près revenu, Marie-Guite Dufay a réagi à son tour : «j'avoue ne pas avoir entendu les propos mais quand effectivement ils me sont remontés, entendre ce mot d'Untermensch,je voudrais dire à Monsieur Lutz, franchement nous ne sommes pas des nazis, nous ne sommes pas dans une assemblée de nazis, je ne suis pas une cheffe nazie à laquelle vous pouvez vous adresser de cette façon».
«C'est une faute extraordinaire pour laquelle je me dois de faire une deuxième plainte au procureur», a-t-elle déclaré avec gravité, «c'est inadmissible».
«Il y a un sentiment d'injustice sur les temps de parole», justifie Julien Odoul
Pour sa part, Julien Odoul a reconnu «une séance comme bien souvent heurtée, animée, en ébullition parce qu'il y a des élections dans quelques semaines».
«Vous ne souhaitez pas, malheureusement, apaiser la situation», a-t-il estimé, «nous aimerions pouvoir parler des sujets importants». «Il y a un sentiment d'injustice sur les temps de parole que vous autorisez pour certains élus en fonction de leur couleur politiques.»
Thomas Lutz contrevient à la «dédiabolisation» du Rassemblement national
Devant la dénégation de Marie-Guite Dufay, Julien Odoul a reproché à Jérôme Durain de «faire de l'esbrouffe». Ce dernier lui a alors reproché de ne pas condamner les propos de Thomas Lutz.
«Vous savez très bien que ce n'était pas à votre [endroit]», a tenté de justifier l'élu populiste. Le porte-parole du Rassemblement national apparaissait visiblement embarrassé par le sujet alors que le parti, désormais conduit par Marine Le Pen, tente de se «dédiaboliser» en prenant ses distances avec les références d'extrême-droite qui ont accompagné la création du Front national par Jean-Marie Le Pen.
Marie-Guite Dufay a conclu l'incident de séance en pointant que c'était bel et bien le recours à ce terme plus que le destinataire du propos qui importait.
En début de session, le groupe du Rassemblement national avait déjà provoqué une interruption de séance en brandissant des pancartes revendicatives, ce qui est interdit par le règlement intérieur.
Actualisé le 11 avril 2024 :En fin de session, Thomas Lutz a exprimé ses «regrets» par communiqué pour une expression utilisée de «manière inadéquate, inappropriée et très malheureuse» (lire ci-dessous).
Interrogé par
Infos Dijon, l'élu du Doubs a confirmé la tonalité du texte : «je présente mes excuses aux gens que cela a pu choquer parce que, effectivement, je ne pense pas que notre groupe soit traité comme l'ont été les juifs pendant la guerre». «Pour moi, ce n'est pas un terme nazi, c'est un terme allemand. (…) C'est un mot qui n'avait aucune connotation ni raciste, ni antisémite, ni de penser que Madame Dufay est une nazie.»
Thomas Lutz précise que «ce mot lui a échappé car étant germanophile» tout en ayant néanmoins «le sentiment d'être traité différemment» au cours d'«une séance très houleuse».
Actualisé le 11 avril 2024 : Interrogé par
Infos Dijon, Marie-Guite Dufay a confirmé sa volonté de déposer une plainte à ce sujet.
Jean-Christophe Tardivon
Communiqué du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté du 11 avril 2024 :Ce jeudi 11 avril, un membre du groupe Rassemblement national au conseil régional, a employé une expression empruntée au vocabulaire nazi lors de l’Assemblée plénière qui se tenait à Dijon.
Après avoir brandi des pancartes associant immigrés et viols plus tôt dans la séance, le Rassemblement national a une nouvelle fois dépassé les bornes de l’outrance en criant l’expression « untermensch » dans l’hémicycle, mot allemand, appartenant à l'idéologie nazie, signifiant « sous-homme ».
« Nous ne devons jamais laisser passer les provocations et les outrances du Rassemblement national sans réagir. Emprunter au vocabulaire nazi est extrêmement grave, et donne un aperçu clair de ceux qui composent aujourd’hui un parti pourtant en quête de respectabilité », a déclaré Marie-Guite Dufay, qui a annoncé dans la foulée son intention de porter plainte auprès du procureur de la République.
Communiqué du groupe Rassemblement national Bourgogne-Franche-Comté du 11 avril 2024 :Face à l’attitude insupportable et antidémocratique de la présidente socialiste de la Région Bourgogne Franche-Comté qui ne cesse de piétiner les droits des élus du Rassemblement National et au cours d’une séance particulièrement houleuse, j’ai utilisé de manière inadéquate, inappropriée et très malheureuse, le terme de « untermenschen » pour qualifier le statut des élus de l’opposition au conseil régional.
Il est bien évident qu’à aucun moment je n’ai voulu faire un parallèle avec le martyr du peuple juif et de nos amis israéliens qui depuis le 7 octobre 2023 subissent la barbarie des terroristes islamistes du Hamas. Aux personnes qui pourraient être blessées, j’adresse mes regrets d’avoir utilisé ce mot.
Je dénonce avec la plus grande fermeté cette odieuse et sordide exploitation politicienne d’une majorité NUPES aux abois dont il faut rappeler les écœurantes connivences avec l’extrême gauche LFI qui considère les massacreurs de juifs du Hamas comme des résistants sans que cela n’ait jamais choqué Marie-Guite Dufay.
Thomas LUTZ
Conseiller régional de Bourgogne Franche-Comté